lundi 26 mai 2008

Le Vésuve, incinérateur miracle

http://www.lesechos.fr/digital/ARCHIVES/PDF_20080526_LEC/docslib/articlepdf.htm?article=../article/4731211.pdf?journee=PDF_20080526_LEC

Le Vésuve, incinérateur miracle

Jeter les ordures dans le Vésuve, voilà la solution miracle qui fait l'objet de vifs débats, ces jours-ci, sur les blogs de la Péninsule italienne. La
nomination d’un «Monsieur Déchets »par le «Cavaliere
»et le classement des sites de décharge en «zones
d’intérêt stratégiquenational » n’ont pas suffi à apaiser
les craintes. Il y va de l’ingéniosité et de la créativité
latines rarement prises en défaut.Qui aurait pu songer
que le glorieux volcan, après avoir inspiré les plus
grands talents poétiques, depuis Virgile jusqu’à Leopardi,
en passant par Goethe ou Chateaubriand, pût
ainsi devenir l’objet de spéculations ordurières ?
En réalité, l’idée de transformer le volcan en
incinérateur naturel polyvalent n’est pas nouvelle.
Elle a même déjà été discrètement expérimentée,
sans préavis officiel.Déjà, il y a un an, les équipes du
Corpsdeprotectiondes forêts italiennesavaient ainsi
exhumé des gisements de pneus de camion, de
carcassesautomobilesetdeconteneurssuspectsmiraculeusement
déposés dans le cratère.Une partie des
ordures a été extirpée de l’antre du Vésuve sous les
applaudissements des riverains.Quandon sait que la
Campanietouteentièreproduit2,8millionsdetonnes
de déchets par an, que 5 millions de mètres cubes
d’« écoballes » ont été entassés au nord de Naples à
ciel ouvert, sous l’oeil vigilant de la Camorra, que les
rats commencent àpullulerdans lequartierhuppédu
Posillipo,onnepeutquerêverd’unesolutionmiracle.
Latentationestgranded’userduvieuxvolcanassoupi
comme d’un dépotoir commode… L’idée d’utiliser
un parc national à des fins expérimentales pourrait
même faireécole. Pourquoinepas jeter les écoballes
dans le Stromboli ?Après tout, on fait déjà du ski ou
du vin sur les pentes de l’Etna.
« Comment peut-on avoir l’esprit aussimal tourné
pour imaginerde remplir d’immondicesunvolcan ! »,
s’indignetoutefoisunécologiste italien quialancé sur
Internet une chaîne de protestations : «Halte aux
détritus dans leVésuve ! ».Onsavait déjàque l’excursion
auVésuve était recommandée par temps clair. Il
faudrait donc aussi, désormais,préférerymonter par
vent fort. Sans compter les risques de « retombées »
incongrues en cas d’éruption imprévisible. Certes, le
cratère est toujours bouché et sa dernière éruption
remonte àmars1944.Mais le volcanest toujoursactif
et l’on enregistre plus de cinq cents secousses telluriquesparanenmoyenne.
Ilyauraitquelquechosede
troublant, voire de déprimant, à imaginer que les
ruines de Pompei puissent être à nouveau ensevelies
sousunecouchede cendres d’immondices.Bien qu’à
cette température, la différence soit minime.
PIERRE DE GASQUET

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