http://www.lesechos.fr/digital/ARCHIVES/PDF_20081022_LEC/docslib/articlepdf.htm?article=../article/4787534.pdf?journee=PDF_20081022_LEC
Des vibrations capables de produire de l’énergie
Trois technologies sont envisagées pour transformer en électricité les vibrations desmachines industrielles.
l faut que ça bouge : àRotterdam,
I Londres et bientôtNew York, des boîtes de nuit ont
inauguré des pistes de danse qui
transforment en électricité les
sautillements des danseurs. Ils alimentent
ainsi une partie des spots
et espèrent réduire de30 %, voire
de 60%, leur facture d’électricité.
Idée saugrenue de noctambule ?
Pas si sûr. Les recherches sur la
récupération d’énergie environnante,
tant de vibrations que de
chaleur, connaissent, depuis
quelques années, un véritable engouement
pour quantité d’applications
industrielles.L’objectifest
simple : transformer cette énergie
mécanique ou thermique en électricité,
même si les puissances générées
sontminimes :dequelques
microwatts (millionièmes de
watt) àquelques dizaines demilliwatts(
millièmesdewatt).C’esten
tout cas suffisant pour alimenter
des capteurs (température, pression,
mouvement) qui, dès lors,
deviennent autonomes.
Lesapplicationsde ces« microgénérateurs
» sont aussi diverses
que les sources de vibrations.
Dans l’industrie, pour le contrôle
et la maintenance ; dans l’automobile,
par exemple, pour surveiller
lapressiondes pneus ;dans
l’aéronautique, pour surveiller
l’usure des ailes ; dans le ferroviaire,
pour assurer la logistique
de wagons ; mais aussi pour produire
de l’électricité à partir des
escaliers mécaniques, des quais
ou sols d’espaces publics... et
pourquoi pas un jour pour alimenter
des pacemakers à partir
des mouvements du corps.
Piézoélectricité
A chaque type d’application correspond
une fréquence de vibration
bien précise. Les appareils
électriques vibrent en général à la
fréquencedu secteur, soit 50 hertz
en Europe, 60 hertz aux Etats-
Unis, alors que les mouvements
du corps humain sont seulement
de quelques hertz.
Trois technologies sont explorées.
La première et la plus
simple, celle des pistes de danse
par exemple, utilise la piézoélectricité
: le sol est légèrement mobile,
sur ressorts, et les vibrations
sont converties en électricité
grâce à des matériaux piézoélectriques,
c’est-à-dire capables de
produire un petit courant électrique
lorsqu’ils sont comprimés.
C’est une filiale du réseau d’innovation
écologique néerlandais
Enviu, baptisée « Sustainable
Dance Club », qui propose cet
équipement.
La deuxième approche, qui
met en oeuvre des composants
électromagnétiques, est pourtant
plus intéressante. Steve Beeby,
chercheur de l’université de Southampton,
un des précurseurs
dans le domaine de la récupération
d’énergie des vibrations, regrette
d’ailleurs qu’on ne l’ait
consulté que tardivement pour
équiper la piste duClub4Climate
de Londres : « L’efficacité desmicrogénérateurs
piézoélectriques
est limitée. Ils peuvent récupérer de
30% à 40% de l’énergie des vibrations,
alors que nos solutions
électromagnétiques en récupèrent
plus de 90%. »Développées avec
son équipe depuis 2001, ces technologies
commencent à être déployées
dans l’industrie depuis
que la société Perpetuum a essaimé
de l’université de Southampton
en 2004. La jeune
pousse, qui rassemble désormais
18 personnes, est même considérée
comme leader mondial de ce
marché naissant. Elle a d’ailleurs
gagné le 1er prix du forumTransatlantic
Green Platform, qui se tenait
en parallèle de la World InvestmentConference
avantl’étéà
La Baule.
Induction électromagnétique
Comment fonctionne cette deuxième
technologie à base de composants
électromagnétiques (voir
schéma ci-dessus) ? Les vibrations
sont transmises à une tige
métallique à laquelle sont fixés
des aimants dont lemouvement, à
proximité d’une bobine de cuivre
fixe, génère de l’électricité. C’est
le principe de l’induction électromagnétique.
L’amplitude des vibrations
est directement liée à la
masse, donc à la taille du dispositif.
Le produit phare de Perpetuum
tient dans un petit cylindre
de 55millimètres de diamètre qui
produitde0,5à40milliwattsselon
l’amplitude des vibrations. « Cela
suffit pour mesurer et transmettre
plusieurs kilo-octets de données
toutes les minutes, ou un volume
moindre plusieurs fois par seconde
», assure Roy Freeland, directeur
général de Perpetuum.
«Nous avons ainsi équipé le site
gazier norvégien Nyhamna de
Shell d’un réseau de 18 capteurs
autonomes alimentés par nos microgénérateurs.
Ils fonctionnent à
des fréquences précises (entre 98 et
100hertzou entre118et 120hertz).
Dès qu’une machine change de
régime, ils le détectent. Ils surveillent
aussi les températures. »
L’objectif de Perpetuum et de
ses concurrents, comme la société
américaine KCF Technologies,
est d’alimenter des réseaux autonomes
de centaines, voire de milliers
de capteurs pour le contrôle
et la maintenance, y compris en
milieux hostiles... Le tout avec le
minimum d’interventions humaines.
Néanmoins, pour bon
nombre d’applications, l’objectif
estde concevoir desmicrogénérateurs
qui fonctionnent àmoins de
100 hertz, dans une large gamme
de fréquences et miniaturisés.
L’idée serait par exemple d’alimenter
de petits dispositifs médicaux,
comme des pacemakers, en
utilisant les techniques de fabrication
des microsystèmes (Mems).
Electrostatique
La course à la miniaturisation
était l’objectif du projet européen
Vibration Energy Scavenging
(Vibes), qui s’est achevé l’an dernier.
Les technologies électromagnétiques
se sont avérées difficiles
à miniaturiser. Le générateur développé
à l’université de Southampton
(150 millimètres cubes
pour 55 microwatts récupérés),
l’un des participants au projet,
utilise finalement les plus petits
composants traditionnels. Les
techniques piézoélectriques furent
plus faciles à miniaturiser, et
un minuscule prototype piézoélectriquea
puêtre conçuàbase de
microsystèmes au laboratoire
Tima à Grenoble : il récupère
1,8microwatt à 1.000 hertz.« Une
fréquence adaptée au contrôle de
machines-outils », affirme Skandar
Basrour, chercheur au Tima.
Quelques laboratoires travaillent
sur une troisième voie, électrostatique,
peut-être celle qui
porte le plus d’espoirs en termes
deminiaturisation : elle fait appel
à des composants électroniques
sur une plaque de silicium, à l’instar
des prototypes développés au
CEA-Leti, qui convertissent le
mouvement en variation de
charge électrique (à proprement
parler, de « capacité »). « Nous
avons conçu deux prototypes de
microsystèmes électrostatiques qui
fonctionnent entre 10 et 100 hertz,
explique Pierre-Damien Berger.
Ils mesurent 40 et 4 centimètres
carrés et nous espérons en réaliser
un d’environ 1 centimètre carré
dans les prochains mois. » L’intérêt
de cette solution est aussi, à
l’image des circuits intégrés, d’assembler
sur unemême plaque de
silicium tous les composants de
l’application (récupération de
l’énergie, stockage, transmission
de données...), « un atout important
pour optimiser la gestion de
ces minuscules quantités d’énergie
», souligne Pierre-Damien
Berger, dont l’équipe développe
une telle plate-forme intégrée de
gestion d’énergie. Si elle est prometteuse,
la technologie demande
encore de nombreux développements.
ISABELLE BELLIN
Même si les puissances générées sont minimes, elles suffisent pour
alimenter des capteurs de température, de pression ou de mouvement.
Le produit phare de Perpetuum tient dans un petit cylindre capable
de produire de 0,5 à 40 milliwatts selon l’amplitude des vibrations.
Perpetuum
Le principe du générateur électromagnétique
idé / Source : Université de Southampton/Steve Beeby
Tige
Masse
Base
Sous l'effet des vibrations,
la tige métallique oscille.
C'est le mouvement
de ces aimants, par rapport
à une bobine de cuivre fixe,
qui génère de l'électricité.
A son extrémité
sont fixés une petite masse
et des aimants.
Bobine
Aimants
Vibrations
mercredi 22 octobre 2008
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