Les fabricants d’emballages vont nous débarrasser du sac plastique
Le marché de l’emballage bio progresse de 22% par an.
La flambée du pétrole, matière première du plastique, rend compétitif le «bioemballage» qui, issu de végétaux, s’autodétruit. Une révolution écologique.
la fabrication à la date de péremption, un yaourt reste emballé quatre semaines. Pourtant, le pot, lui, dure quatre siècles!» Patron du groupe français Sphere, leader européen de l’emballage ménager, John Persanda brûle de mettre fin à ce genre d’absurdités. Ces dernières années, ce chimiste de formation s’en est donné les moyens en rachetant Biotec, un labo allemand spécialiste des plastiques biodégradables à base de composants naturels, puis en prenant le contrôle, dans la Marne, d’une féculerie et d’une coopérative agricole. «De la fécule de pomme de terre, on tire une matière première semblable aux granulés de polyéthylène issus du pétrole, explique-t-il. Ensuite, le processus de fabrication d’un emballage est le même.» Le résultat présente les mêmes qualités (résistance, transparence...) que les emballages d’origine chimique. Avec un atout en plus: sous l’action des micro-organismes bactériens, ils disparaissent purement et simplement en quelques mois.
Fécule de pomme de terre, amidon de maïs, céréales diverses: les matières végétales offrent enfin une alternative crédible au pétrole, dont 4% de la production mondiale sert aujourd’hui à fabriquer des sacs, pots et autres films plastique. Certes, en 2006, seules 42000 tonnes de bio ont été commercialisées dans le monde (contre environ 2 millions de tonnes d’emballages plastique consommées par la France). Mais les ventes augmentent de 22% par an, et l’on devrait atteindre les 120 000 tonnes en 2011. Car tout pousse au décollage de ce nouveau secteur. La hausse continue des prix du pétrole et le progrès technique rendent les nouveaux matériaux presque compétitifs. «Le prix de revient de 1 kilo d’acide polylactique d’origine végétale est maintenant de 2 euros, contre 1,20 euro pour le polyéthylène chimique, calcule Annette Freidinger-Legay, du cabinet Côté Emballage. En 2004, l’écart était du simple au triple.» Les géants de l’alimentaire et de la distribution suivent, contraints par la législation environnementale de plus en plus sévère sur l’utilisation et le recyclage du plastique.
La balle est donc dans le camp des industriels de l’emballage. Et, pour réduire la part du plastique, qui finit à 50% en décharge, ils ne manquent pas d’idées. L’une d’elles consiste à imaginer des matériaux de plus en plus légers. Le groupe américain Graham a ainsi collaboré avec Danone pour parvenir à une réduction de 10% du poids d’emballage utilisé entre 2000 et 2006. Engagée de longue date (depuis sa mise sur le marché à la fin des années 1990, la fiole d’Actimel a par exemple maigri de moitié), la chasse au surpoids s’attaque maintenant au moindre microgramme superflu: le groupe Veriplast vient ainsi de lancer une étiquette d’emballage de seulement 38 microns d’épaisseur, au lieu de 60 habituellement.
Pour aller plus loin, il va maintenant falloir passer au bioplastique. Contrairement aux bio- carburants, dont la production de masse exigerait la reconversion de vastes surfaces agricoles, le pari n’a rien d’irréaliste. «Avec seulement 4% des terres arables françaises, on peut faire pousser de quoi produire tout l’emballage consommé en France», assure John Persanda. Quant aux surcoûts qui freinent encore le décollage du secteur, il les attribue essentiellement à un effet de taille: «Notre marché sort tout juste du stade de la niche, mais, à mesure que la production augmentera, les matières premières nous coûteront de moins en moins cher.»
Bref, il ne manque plus qu’un coup de pouce. Les industriels souhaiteraient une taxe sur le plastique d’emballage, identique à celle qui devrait frapper les «sacs de caisse» non dégradables à partir du 1er janvier 2009. Avec le même objectif en tête: améliorer la compétitivité du bio et financer leurs recherches pour remédier à ses ultimes défauts. Beaucoup a déjà été fait. On sait ainsi régler avec précision la vitesse de dégradation des matériaux et l’adapter à divers usages: dans les plantations antillaises, les films couvrant les régimes de bananes résistent désormais quatre mois avant de se décomposer, malgré la température et l’humidité élevées.
Aujourd’hui, il reste à régler le problème de la résistance à la cuisson: avec son «point de ramollissement» situé à 60 degrés, contre environ 100 degrés pour le plastique classique, le bio sied mal aux plats cuisinés à cuire au micro-ondes. Les géants américains du secteur (notamment les groupes Cargili et Dow Chemical) s’apprêteraient à trouver la solution. «Attention, prévient John Persanda. La recherche européenne a cinq à dix ans d’avance, ne perdons pas cet avantage juste au moment où le marché décolle.» Transmis aux équipes du Grenelle de l’environnement...
Frédéric Béghin•
UN MATERIEL NON POLLUANT A BASE DE PATATES
Avec la fécule de quinze pommes de terre, on produit (sur des installations identiques) autant de sacs qu’avec l’équivalent d’une bouteille de pétrole. Facile à recycler ou à brûler en fin de vie, le bioplastique s’autodétruit à 100% en six mois s’il est abandonné dans la nature, alors que la moitié des emballages plastique consom més en France finissent en décharge, où il leur faudra quatre siècles pour se décomposer. A base de patates ou de maïs, le bio permet déjà de réaliser des sachets (comme pour la laitue bio de Monoprix), des barquettes (viande hachée Carrefour, en Belgique) ou des plateaux à alvéoles pour les boîtes de chocolat (Cadbury).
Source : Avril 2008 Capital
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