http://www.lesechos.fr/digital/ARCHIVES/PDF_20080519_LEC/docslib/articlepdf.htm?article=../article/4727548.pdf?journee=PDF_20080519_LEC
Matières premières : ce n’est qu’un début
LA CHRONIQUE DE
KENNETH ROGOFF
Ltaièhreasupssreemdiuèrepsrimxedteesnmévai--
dence une vérité que beaucoup
de dirigeants politiques ne veulent
pas entendre : les ressources
naturelles de laplanète sont limitées
et les consommateurs occidentaux
doivent maintenant les
partageravec lesmilliardsdepersonnesquisortentdelapauvreté.
Voici une autre vérité : le mécanisme
de fixation des prix par le
marché est un meilleur système
de distribution des ressources
naturelles que les guerres −méthode
utilisée par les puissances
occidentales au siècle dernier.
Le programme irréfléchi de
subvention des biocarburants est
l’exemple de ce qu’il ne faut pas
faire. Employer des terres agricoles
pour produire des biocarburants
a contribué à lamultiplication
par deux du prix du blé et
d’autres céréales. Avec les
émeutes de la faim dans une
dizainedepays,letempsestpeutêtre
venude reconnaître l’erreur.
Cen’estpas laseule. Il y aaussi
la proposition de deux des candidats
à la présidentielle américaine
de supprimer temporairement
la taxe sur l’essence.Même
si cela permetaux automobilistes
peu fortunés de faire face à la
hausse du prix du carburant, ce
n’est pas la bonne méthode. Il
faut au contraire augmenter ce
prélèvement. La triste réalité est
qu’enmaintenant le pétrole à un
prix élevé, l’Opep fait bien plus
pour la protection de l’environnement
que les responsables occidentaux
qui cherchent à prolonger
l’hyperconsommation
dans leurs pays, insoutenable du
point de vue écologique.
Ce n’est pas seulement le pétrole
qui est cher,mais toutes les
matièrespremières,desmétauxà
l’alimentation, en passant par le
bois. La cause immédiate en est
leboomdel’économiemondiale,
le plus fort et le plus long de
l’histoire moderne. L’Asie a ouvert
la voie, mais les cinq dernières
années ont été les meilleures
pour l’Amérique latine et
l’Afrique depuis des décennies.
Certains dirigeants politiques
s’en prennent aux spéculateurs
qui échangent les matières premières
sur des marchés complexes
en plein développement,
cequi leur permetdepariersur le
fait que, dans l’avenir, la demande
des pays émergents va
dépasser l’offre. Pourquoi seraitceunemauvaise
chose ? Sachant
qu’elles seront aussi nécessaires
aux futures générations, les spéculateurs
enchérissent aujourd’hui
sur les matières premières.
N’est-ce pas une réaction saine ?
Un prix élevé aujourd’hui signifie
qu’il en restera davantage demain
et encourage la recherche.
Cela va dans le sens d’une politique
que les dirigeants occidentaux
ont peur d’envisager.
La hausse mondiale du prix
des matières premières a des effetsprofondssurlapauvreté.
Si la
hausse des cours est favorable
aux paysans pauvres disposant
de ressources naturelles, c’est
une catastrophe pour les nécessiteux
en milieu urbain, dont certains
dépensent près de lamoitié
de leur revenu pour se nourrir.
La solution consiste notamment
à aider les plus démunis face à
l’élévationdu coûtdeleur survie.
A long terme, il est essentiel de
consacrer davantage d’argent
aux engrais et aux aides qui encouragent
l’autosubsistance. La
Banque mondiale, l’ONU et
même l’administration Bush ont
pris des mesures, même si elles
restent insuffisantes.
La fin du consumérisme occidental
n’est pas encore en vue,
mais le prix des matières premières
est un avertissement sans
ambiguïté de la nécessité d’ajustements
importants pour s’adapter
au fait que l’Asie et d’autres
pays émergents commencent à
manger unepart plusimportante
du gâteau.Lorsque le booméconomiquemondial
va se terminer,
le prix desmatières premières va
chuter − aumoins de 25 %,mais
peut-être de 50% ou même davantage.
Les dirigeants occidentaux
applaudiront. Mais la
hausse du prix des matières premières
n’est pas simplement un
mauvais rêve que l’on oubliera.
C’est un message important sur
leur raréfaction dans un monde
qui seglobalise.Ceuxqui veulent
l’ignorer, notamment en bloquant
les forces du marché, font
une erreur tragique.
KENNETH ROGOFF est professeur
à l’université Harvard et ancien
économiste en chef du FMI.
Cet article est publié
en collaboration avec
Project Syndicate.
mardi 20 mai 2008
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